DWIGHT TRIBLE – « MOTHERSHIP »

TELLURIQUE

PAR CHRISTIAN LARREDE

Que l’on découvre aujourd’hui, et grâce à ce troisième album en nom propre, le plus que sexagénaire Dwight Trible est tout à la fois rageant (si l’on considère une carrière, croisant aussi bien Charles Lloyd que Bobby Hutcherson), et heureux : tout vient à point pour ce disciple de Leon Thomas.

La plénitude du chant du jazzman angeleno peut désormais – et ici – se déployer dans le cénacle de compagnons de sessions, appréhendés comme constitutif d’un all-star band : le saxophone ténor de Kamasi Washington semble désormais l’invité évident des enregistrements majeurs du moment. Carlos Nino aux percussions ou le contrebassiste John B. Williams agrémentent cette phalange qui veille à offrir à Trible l’écrin le plus pertinent. Et le répertoire retenu spécifie le lyrisme qui habite le leader : les emprunts aux répertoires d’Oscar Brown Jr. ou Donny Hathaway sont ainsi emplis d’un élan tellurique qui laisse pantois. Mais on avouera une préférence certaine pour la version du « Tomorrow Never Knows » des Beatles. En casting réduit (dans lequel les envolées acides du violon font merveille), Trible jette un pont entre ce premier acte du rock psychédélique britannique et son jazz (dans lequel la batterie s’autorise des scansions binaires), et entre deux époques (celle de l’innocence, et celle du cynisme brutal). Le tout s’appuyant sur un chant profond et passionné, irréductible, et triomphant.

DWIGHT TRIBLE

Mothership

(Gearbox Records/Differ-ant)

JAZZ