AKSAK MABOUL – « FIGURES »

LES VISAGES DE L’ÉTRANGE

PAR CHRISTIAN LARRÈDE

Après trente années de silence, et grâce à 22 chansons et intermèdes, Aksak Maboul signe ici et un improbable retour, et un impeccable double album.

On est en droit de tout mélanger : la création par Mark Hollander de ce groupe belge en 1977, dans une optique revendiquée de s’asseoir à la table de Robert Wyatt, Henri Cow ou The Residents, et l’intégration trois années plus tard de Véronique Vincent, chanteuse des Tueurs de la Lune de Miel. La mise en sommeil des diverses incarnations de l’ensemble, après deux albums batifoleurs et terriblement contemporains, et d’une inspiration jugée visionnaire, ce qui permet à Hollander de créer le label Crammed Discs, plus de 350 références au compteur, d’Hector Zazou à Minimal Compact, en passant par Tuxedo Moon.

La publication, en 2014, d’un disque supposé perdu (Ex-Futur Album), et le succès qui accompagne cette sortie incitent le duo, après quelques galops d’essai scéniques, à retrouver le chemin des studios. Riche idée, tant la production mêle malicieusement des fondamentaux pop, la poésie de paroles aux climats toujours à quelques encablures de la rupture, et la fantaisie d’harmonies inusités, jaillissant de leurs boîtes comme autant de diablotins. L’apparence de foutoir libertaire et, partant, audacieux, dissimule en fait une grande précision d’écriture, servie par l’interprétation d’anciens Maboulistes, et de quelques invités de marque, dont le guitariste Fred Frith, des membres d’Aquaserge, ou de Steven Brown de Tuxedo Moon. Le tout finit par rutiler tel un pandémonium, dans lequel se bousculent un salut à Frank Zappa, un Georges Pérec de parodie, et, au choix, des ballades oniriques serties de vibraphone et clarinette basse, ou de crissements acides.

AKSAK MABOUL

Figures

(Crammed Discs)

POP