PAR CHRISTIAN LARREDE
…et ici s’achèvent The Bootleg Series, entreprise d’envergure rendant compte, à la fois des prestations européennes ou américaines de Miles Davis, mais également des sessions in extenso d’albums mythiques du trompettiste (Miles Smiles). Et ici s’achèvent également la collaboration de ce dernier avec John Coltrane, décédé en 1967 : le duo se séparera après une tournée de trois semaines qui, en 1960, les mènera, en compagnie du pianiste Wynton Kelly, Paul Chambers à la contrebasse, et du batteur Jimmy Cobb, sur la scène de l’Olympia de Paris comme au Danemark ou en Suède, ainsi qu’une ultime date à Baltimore. Comme nous y a habitués la collection, ce coffret quadruple à tout l’aspect d’un objet définitif (riche iconographie, annotations historiques et stylistiques, et remarquable travail de pressage à partir des documents analogiques d’origine, même si le concert de Copenhague est le fruit d’une captation de la chaîne nationale de radio). Á partir d’un répertoire partagé entre standards, parfois malmenés par des musiciens ouverts à toutes les épopées (« On Green Dolphin Street »), et des partitions parmi les plus fameuses de l’univers du jazz (« So What », « Oleo », ou « All Blues »), Kelly initie auprès du quintet un renouvellement complet de l’invention harmonique, permettant entre autres à son leader de rompre sa distanciation comme une seconde nature, sans mettre sous le boisseau un lyrisme de chaque mesure. Quant à Coltrane, copieusement hué par le public français irrité par ses innovations, il est alors et à ce prix en route vers un statut légendaire.
MILES DAVIS & JOHN COLTRANE
The Bootleg Series Vol.6
(Legacy /Sony Music)
JAZZ