LE PEINTRE ET L’ASSASSIN
PAR CHRISTIAN LARREDE
Méconnu de ce côté de l’Atlantique, le peintre canadien Tom Thomson est dans son pays considéré à l’égal de Picasso. Évocation de sa fulgurante carrière, et de sa mort mystérieuse…
Après « Glenn Gould, Une Vie A Contretemps », l’auteure Sandrine Revel, se penche sur l’étrange destin d’un artiste à la fulgurante carrière, cinq années au cours desquelles, à partir de 1912, il peint une cinquantaine de toiles paysagistes et plusieurs centaines d’esquisses (parfois sur de simples boites à cigares). Tom Thompson, considéré comme co-fondateur post mortem – et à tort – du Groupe des sept, cette réunion d’amis qui allait révolutionner l’art pictural canadien du XXème siècle, mais également pêcheur et nageur émérite, guide, pompier forestier et garde du parc provincial Algonquin, en Ontario, compila les mystères. De sa pratique, inspirée de l’Art Nouveau, et dont l’utilisation de couleurs épaisses et l’approche intime des sujets, qui le détournera au début de toute critique positive, avant que la notoriété ne le rattrape dans sa démarche. De sa mort, à peine quadragénaire, enfin, (et de l’emplacement de sa tombe), qui déchainera hypothèses (crime crapuleux, suicide, simple accident ?) et multiples suspicions, lorsque son cadavre tuméfié remontera à la surface d’un lac.
En un remarquable rebours chronologique, Sandrine Revel assume la double démarche de l’évocation d’une personnalité artistique atypique, et des méandres d’une enquête policière en pays sauvage. Son travail se nourrit – au-delà de quelques rares à la manière de – d’une maîtrise absolue, tant dans un agencement classique des cases qui peuvent imploser sous les coups de boutoirs de la nature, que la juxtaposition du noir et blanc (les forêts) et des couleurs (les personnages). Un album exceptionnel.
SANDRINE REVEL
Esquisses D’Un Printemps
Editions Dargaud, 144 pages, 21 euros