SAVEURS JAZZ FESTIVAL

FEMMES PLURIELLES

PAR FRANCISCO CRUZ

À midi, des oiseaux chanteurs au-dessus des arbres introduisent le concert du quartette Enez, dans les jardins du château de Falloux. Dans un cadre moins poétique, sous le chapiteau de Segré, le soir venu, Sandra Nkaké transporte le public. Avec la complicité «théâtrale» du flûtiste Ji Dru, et le beau soutien mélodique de la guitariste Tatiana Paris, la chanteuse donne le rythme avec les ondulations de son corps et partage avec un bonheur manifeste le voyage introspectif proposé par son récent album, Tangerine Moon Wishes. Autour de minuit, le son de Morcheeba recrée l’ambiance bristolienne d’il y a 20 ans et, par le retour en grâce de la chanteuse Skye Edwards, inocule le virus du trip hop à un auditoire multi générationnel (enfants et anciens inclus). On se laisse attraper par le phrasé circulaire et le beat répétitif de «The Sea» et «Big Calm», dansant, et hors du temps. Dans un registre blues-punk, verre de vin sur le piano et voix éraillée, Sarah McCoy joue à fond son personnage fellinien aux histoires pathétiques et, avec un touchant accent néo-orléanais enclin à l’auto-dérision, installe une complicité immédiate avec le public. La fantasque chanteuse-pianiste, passe de l’émotion vive à l’errance…

Attendue comme la star du programme, Selah Sue convoque l’auditoire le plus garni. Les jeunes filles se pressent devant la scène pour ne rien manquer de son dernier projet «acoustique» en trio (avec claviers et violoncelle). Qui se révèle plutôt électro-acoustique, tant l’utilisation de sources électroniques est omniprésente. La chanteuse flamande partage son bonheur de jeune mère, stimulant l’adhésion du public, pour ensuite dérouler un répertoire jazzy-pop-soul qui se délite progressivement, abimé par une sonorisation agressive qui aplati toute nuance et déforme, hélas, le timbre de sa voix.