LILJA SIGURDARDOTTIR – « LA CAGE »

WHAT A WONDERFUL WORLD…

Sur fond de crise financière mondiale – que le pays de Björk a affronté (violemment) il y a dix ans -, l’auteure islandaise tisse une trame dramatique excitante, pour conclure sur un rythme haletant sa trilogie Reykjavik Noir.

PAR FRANCISCO CRUZ

Après avoir séduit avec ses romans intensément noirs Piégée et Le Filet, c’est avec La Cage que Lilja Sigurdardottir conclut en beauté sa fine et ironique analyse de la liaison criminelle qui rattache désormais de façon fusionnelle le monde de la finance et le pouvoir politique. Une entreprise développée sciemment en Europe par les mercenaires du capitalisme ultra libéral, la même caste qui, après avoir saccagée les finances publiques sud-américaines et sud-asiatiques, profitent de législations vieillissantes au service des oligarchies, pour prendre la direction des principaux axes de l’économie mondiale. Façon élégante de nous rappeler que, bien avant la tragédie grecque et autres crashs retentissants, il y eut l’implosion financière islandaise.

Connectant sur un mode très lucide, et empreint d’humour, la sphère politico-financière avec celle du commerce de matières premières et les réseaux intercontinentaux du trafic de drogues, l’auteure concocte un cocktail ultra-explosif à lire sans modération. Pimentant de surcroit son récit avec la peur du terrorisme islamiste et les pulsions dévastatrices de l’amour adolescent, Sigurdardottir et ses personnages complices et féminins (Agla, Sonia, Maria…) traverse les frontières du thriller et dynamite allègrement les faux semblants de la société occidentale contemporaine avec ses relents de racisme, de sexisme et d’homophobie. Un environnement fortement contaminé dans lequel une cellule de prison (une cage) est parfois plus salutaire que l’espace citadin et d’où, ironie ultime, les criminels financiers peuvent continuer tranquillement à réaliser de grosses opérations via Internet. Voilà l’édifiant paysage social (toute ressemblance avec notre actualité est pure coïncidence !) dépeint par la plus intéressante des plumes islandaises découverte dans les traces de l’incontournable Arnaldur Indridason.

LILJA SIGURDARDOTTIR

La Cage

Editions Métailié, 320 pages