UNE EDITION DEDIEE AUX LEGENDES
Après deux ans de silence forcé, de distanciation, musiciens et amateurs de spectacles vivants vont se retrouver. Des retrouvailles pas si évidentes, contrairement aux apparences, tant les nouvelles générations sont éloignées – par les nouvelles technologies et le formatage de la production culturelle dont elles facilitent la diffusion -, des expressions les plus libres, les plus riches, parce qu’ancrées dans le creuset des traditions.
Quand beaucoup de festivals jouent la facilité (à voir sur la distance), Jazz à Juan garde le cap, avec une fidélité à son histoire et aux grandes figures du jazz, du blues et des musiques du monde, à souligner.
PAR ROMAIN GROSMAN
Clairement, le temps passe. Ce n’est pas leur faire offense que de signaler l’âge d’Herbie Hancock (82 ans), de George Benson (79 ans), Charles Lloyd (84 ans), ou Gilberto Gil (80 ans), Van Morrison (76 ans). Tous ceux qui ont pu voir Sonny Rollins, Wayne Shorter, Ahmad Jamal ou même les regrettés James Brown, Ray Charles, lors de leurs dernières tournées, savent combien l’expérience et la densité de ces artistes surpassent la mesure de la performance pure. Profiter de leur immense talent, mesurer leur empreinte dans le jazz, l’improvisation, la musique populaire brésilienne ou le blues constitue encore et toujours une opportunité de s’enrichir et de se ressourcer à ne pas manquer.
Mais Jazz à Juan alterne mémoire et actualité avec la présence de Cecile McLorin Salvant (le 6), incontestable révélation du jazz vocal, originale, exigeante, ne cédant rien à son désir de curiosité, d’expérimentation, tant dans le choix de son répertoire que dans son style d’une fraicheur chaque fois renouvelée. Le collectif Snarky Puppy brasse jazz, funk, dans une fusion surtout convaincante en live. Tout comme les rythmes afro-cubains revisités par le pianiste Roberto Fonseca (9 juillet). Trombone Shorty (11 juillet) perpétue lui l’énergie des brass bands de La Nouvelle-Orleans avec une pointe de funk et de rock hautement énergétique.
Dans un programme décidemment qualitatif, on suivra plus particulièrement les prestations de John Legend (10 juillet), remarquable chanteur et compositeur, aux racines gospel perceptibles même dans un style devenu plus mainstream, et surtout la réunion au sommet de Chucho Valdes et de Paquito D’Rivera (12 juillet) qui officièrent il y a près d’un demi-siècle au sein d’Irakere, formation mythique du patrimoine afro-cubain.