EL REINO

TOUS POURRIS

PAR CHRISTIAN LARRÈDE

Un homme politique espagnol, influent au point de prendre des responsabilités nationales dans son parti, est empêtré dans un scandale tout en corruption, prévarication, et autre concussion. Est-il prêt à couler en solitaire ? La suite démontrera que non.

Après Que Dios Nos Perdone (le soleil estival et brûlant de Madrid, avec un tueur en série en prime), Sorogoyen s’essaie au thriller politique, et conserve à l’acteur Antonio De La Torre Martin (ici formidable) sa confiance pour mener à bien cette saga au royaume des puissants. Malgré quelques mignardises récurrentes dans la mise-en-scène (une bande musicale en format techno jusqu’à plus soif, la présence récurrente d’un whisky japonais, sans nul doute en placement de produit, l’utilisation d’une longue focale dans la deuxième partie du film, et, partant, d’un cadrage serré d’entomologiste, et pour le spectateur une franche et réjouissante incompréhension quant aux tenants et aboutissants de l’intrigue), El Reino s’élabore sur un précepte élémentaire : la vérité des belligérants n’est absolument pas celle du commun des mortels, et leur logique échappe aux gens de peu. Dès que l’on accepte de passer outre les invraisemblances (De La Torre transmuté en tueur au stylo), et dès qu’elle bascule dans une dynamique de simple thriller, l’intrigue captive, au point que l’on ne voit pas les plus de deux heures s’écouler. Le tout est implacable, sordide, et vertigineusement immoral : le héros ne se bat pas pour sa famille, ou ses convictions (?), il se bat, tout simplement.

EL REINO

de Rodrigo Sorogoyen