PINK FLOYD – « PULSE »

Au moment de sa mise en scène live et de sa publication audio (et) audiovisuelle, le concert Pulse avait engrangé les plus vifs éloges. Presque trente ans plus tard, une nouvelle édition de luxe, restaurée, et agrémentée des images documentaires et de vidéos additionnelles, est publiée pour le grand plaisir des « Pinkfans ». Néanmoins, revoir ces images aujourd’hui ne produit plus le même effet.

PAR FRANCISCO CRUZ

(R)EVOLUTION TECHNOLOGIQUE

Avec le recul, force est de constater que la (perception de la) qualité de la musique ici documentée a changé, devenue plus accessible (pop). Le concert filmé en octobre 1994 à Londres, édité en trois épisodes, démarre avec les cinq premières parties de «Shine On You Crazy Diamond» et atteint un bref climax avec «Another Brick In The Wall». S’ensuit une longue séquence consacrée au répertoire de The Dark Side Of The Moon, qui s’avère la plus riche musicalement.

Dans le format double-DVD, le deuxième volume réunit divers films courts et des morceaux live tirés de captations – et d’enregistrements audio – de différents concerts en Europe et aux Etats-Unis. On y retrouve deux versions de «A Great Day For Freedom», de «Brain Damage» et d’«Eclipse». Hormis une captation de «Marooned» en 2014, et une version de «Wish You Were Here» avec Billy Corgan, tout le matériel ici réuni date de 1994.

Année faste si l’on croit les liner notes et le nombre très important de spectacles offerts par le groupe. Car, bien au-delà d’un simple concert, Pulse est surtout un spectacle où la technologie prenait le dessus sur la musique. La scène transformée en champ d’expérimentation sonique et visuel, alimentée par force électricité, faisant du rayonnement laser le protagoniste principal du show, ce qui n’en fait pas un modèle d’écologie.

Dans cet environnement, les musiciens paraissent bien moins importants que de coutume, malgré les gros plans sur eux – et surtout sur David Gilmore – et même le son passe au second plan au bénéfice de l’architecture lumineuse et des sujets divers en projections vidéo. Les musiciens sont souvent comme « cramés » par l’intensité de leur exposition aux faisceaux de lumières. La répétition de plans sur de longs accords risque de lasser au bout d’une heure.

Néanmoins, le programme au complet, tant du premier comme du second DVD, ne déçoit ni ne s’écroule, car il s’appuie toujours sur des morceaux emblématiques de la « Pink era » précédente : «Money», «Time», «Eclipse». La force d’interprétation de Gilmore, la solidité rythmique de Nick Mason, le doigté efficace de Richard Wright, sont bien là. La contribution précise de Dick Parry (sax) et la prestation spectaculaire de Gary Wallis (percussion) aussi. Mais l’absence de Roger Waters – son charisme, sa poétique musicale – se fait sentir. Comme si la fascination pour les prouesses technologiques avait en quelque sorte éclipsé la créativité et l’exploration musicale par-delà l’horizon ouvert par The Wall. Dans cette dimension, la progression époustouflante de la technologie scénique opérée dans l’espace de ces dernières trente années, révèle sans regret combien cette Puls(e)ation n’avait plus le beat organique d’Atom Heart Mother ni le mystère de (la version originale de) Dark Side Of The Moon.

PINK FLOYD
Pulse
(PFR / Warner)