MATTHIEU SAGLIO – « LIVE IN SAN JAVIER 2021 » – « EL CAMINO DE LOS VIENTOS »

Les abus de pouvoir commis dans le cadre du traitement politique du covid-19, auront permis non seulement l’éclatement du tissu social, mais aussi la mise en danger de l’activité artistique. Entre confinements et lois liberticides, un nombre incalculable de projets musicaux se sont perdus à travers le monde, d’autres sont restés bloqués dans l’anonymat de la distribution avortée ou sur les plateformes digitales. Heureusement, de beaux enregistrements s’extirpent du marasme et se font entendre après ce silence assourdissant… En voici deux du violoncelliste français installé en Espagne, en studio et en concert…

PAR FRANCISCO CRUZ

SUR LE CHEMIN (A INVENTER)

Le répertoire de ces deux albums est (presque) identique. Pourtant, toute prétention de les soumettre à une écoute miroir s’avère infructueuse, absurde même, tant les conditions dans lesquelles ils ont été enregistrés sont différentes.

Le live au Festival de Jazz de San Javier (en Espagne pour sûr) arrive un an après que Saglio ait emprunté le Camino De Los Vientos (chemin des vents). Les « marcheurs » qui accompagnaient alors le violoncelliste sont des pointures des musiques improvisées européennes – le bassiste espagnol Carles Benavent (trois décennies aux côtés de Paco de Lucia), le trompettiste norvégien Nils Petter Molvær, le guitariste de Barbés Nguyên Lê -, rejoints par Vincent Peirani et Bijan Chemirani.

Ils ne sont pas du concert où Saglio se présenta entouré du pianiste Christian Belhomme, de l’accordéoniste Carlos Sanchis et d’une cour de nomades qui poursuit son chemin avec lui : les chanteuses Isabel Juive et Camille Saglio, le violoniste Léo Ullmann, le percussionniste Steve Shehan, le chanteur Abdoulaye N’Diaye.

A la justesse et à la finesse toute maîtrisées du studio succèdent l’intensité et l’émotion du live, où l’énergie émanant des musiciens et du public circule comme une irrépressible onde vitale (lors d’une période trouble et menaçante). En concert, se révèlent pleinement toute la force des voix de N’Diaye et d’Isabel Juive. Les «Cositas Del Querer» restent longtemps dans la mémoire, «Après la Pluie» et le «Bolero Triste».

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Entre les deux albums, on ne saurait choisir. On peut cependant préférer les versions studio d’«Amanecer» avec Molvær, «L’Appel Du Muezzin» avec Chemirani et «Caravelle» – une variation du «Boléro» de Maurice Ravel – avec Lê.

A la fin, on peu adopter ce mode d’écoute et sauter d’un disque à l’autre, comme Saglio qui change de climat, d’ambiance, de registre, entre évocations tournoyantes du flamenco, souvenirs syncopés du tango, ondulations mélodiques arabisantes, errances jazzistiques modales. Cherchant un avenir possible, pour la musique, pour la vie.

MATTHIEU SAGLIO
Live In San Javier 2021
(Pulpito Records)

 

 

 

 

 

El Camino De Los Vientos
(Act)