L’ANCETRE DE MOBY DICK
PAR FRANCISCO CRUZ
On connait l’empathie de l’écrivain chilien envers les animaux, des êtres nobles qui pallient les désillusions provoquées par le genre humain…
Les baleines ont souvent été au centre des préoccupations de l’auteur. Après avoir sauvé sa propre vie de la terreur militaire (dictature de Pinochet), son exil européen fut largement occupé par un engagement très actif auprès de Greenpeace : ses luttes sociales se sont alors transformées en batailles écologiques. Écrivain et activiste, Sepúlveda a consacré le plus clair de son existence à défendre la vie des baleines, et parmi ses ennemis prédateurs les plus redoutables on trouve les baleiniers japonais. Au fil de ses écrits, sa conscience écologique s’est exprimée à travers l’histoire d’un chat qui venait au secours d’une mouette victime du pétrole, puis d’un escargot qui découvrait l’importance de la lenteur ; et aussi d’un chien qui sauvait un indien mapuche persécuté pour avoir voulu faire respecter (par les blancs) la nature. La perte de valeurs solidaires entre les hommes lui a inspiré une belle amitié entre un chat aveugle et une souris.
Et si les trahisons politiques contemporaines ont alimenté amèrement son récit « La Fin De l’Histoire », c’est la violation de tous les accords pour la protection des baleines, chassées sur toutes les mers, qui ravive ici sa mémoire au moment d’évoquer – au large de l’île Mocha, sur la côte sud du Chili – le mythique cachalot Mocha Dick, l’inspirateur du Moby de Melville … Un animal fabuleux autrefois vénéré par les indiens lafkenche (gens de la mer), des mapuches qui respectaient la nature, mais furent presque effacés de (la surface de) la terre. Luis Sepúlveda fait parler la mythique baleine blanche et nous invite à devenir les lafkenches du futur.
LUIS SEPULVEDA
Histoire D’Une Baleine Blanche
illustré par Joëlle Jolivet
Editions Métailié. 120 pages. 12 €