LA LUTTE DES CLASSES

LES BOBOS DE L’ÉCOLE

PAR CHRISTIAN LARRÈDE

Une famille recomposée s’installe à Bagnolet. Elle, brillante avocate issue de l’immigration (Leïla Bekhti), pratique la science de l’évitement. Lui, punk-rocker blanchi sous le harnais, s’attache à ses principes comme à une bouée de sauvetage, dans un monde qu’il ne comprend plus. Quant à leur jeune fils, il tente de se frayer un chemin dans l’école du quartier.

Pour le réalisateur Michel Leclerc (Le Nom Des Gens, en 2010, Télé Gaucho, en 2012) et sa coscénariste de compagne Baya Kasmi, l’homme est un animal social, peu ou prou condamné à ne pas sortir d’une dialectique de classe. Et ce contrat social, qu’il considère comme rompu, ne sera à ses yeux rétabli que dans le dialogue. Ce qui nous vaut quelques plaisantes saillies (essentiellement de la part d’Edouard Baer en musicien momifié, ou dans la bouche de Ramzy Bedia, ici directeur d’école aussi survolté qu’incompétent). Mais également une somme de douloureux constats : puisque la carte scolaire s’avère soluble dans la réalité quotidienne, les bobos ne nous sauveront pas des communautarismes. Et cet affrontement entre école publique décrépite et école privée, ouatée comme un sarcophage, laissera chacun chez soi, plein d’amertume et loin de la mixité initialement prônée. Le constat est douloureux pour cette frange du peuple de gauche, ramenée à la triste réalité que vouloir le meilleur pour sa progéniture cohabite difficilement avec la violence, la baisse de performance, ou la pédagogie hystérique de l’école républicaine. Et par-delà le caractère grand-guignolesque de la scène conclusive (un hijab, fabriqué par un travailleur chinois du textile, et utilisé par une adepte de la varappe, sauvera, sinon le monde, du moins un instituteur), la morale mondialiste que l’on peut en tirer ne satisfera personne.

LA LUTTE DES CLASSES

de Michel Leclerc