L’AMOUR EST AVEUGLE
PAR CHRISTIAN LARRÈDE
Après un accident de scooter et un long coma de plusieurs mois, un cadre supérieur perd la vue, et souffre d’un handicap cognitif. Son épouse raconte dans un roman à clef les affres de leur nouvelle existence. Le cercle d’amis apprécie modérément.
Éric Lavaine nous avait laissé un bon souvenir quant à son aptitude à trousser une comédie chorale (Barbecue, en 2014), et même à manier l’amertume comme un déclencheur comique (Retour chez Ma Mère, en 2016). En toute logique, Chamboultout est donc un film drôle (parfois), choral et amer, dans lequel s’agite une bande de copains en voie de désagrégation. Mais là où on espérait une approche satirique des rapports entre hommes et femmes (la comédie humaine, et tout ce genre de choses), ou même une réflexion sur la générosité et la place des handicapés dans notre société, on ne se voit offrir la plupart du temps qu’un recyclage de vieilles lunes. On sait que la scène paroxystique de règlements de compte entre potes va arriver, et elle arrive. On imagine que la gestion de la situation vécue par l’héroïne ne sera pas bouleversifiante, et c’est le cas : « cela fait cinq ans que Frédéric ne bande plus. Je me débrouille. » Les scènes drôles sont torpillées par les moments plus sentimentaux, et on finit par perdre intérêt pour cette cohorte pléthorique, mais aisée (se déchirer sous le soleil de Biarritz, cela a tout de suite une autre dimension). Restent, malgré des archétypes frôlant parfois la caricature, les performances des deux têtes d’affiche : José Garcia, en non-voyant, boulimique, dépourvu de mémoire immédiate et incapable de taire ce qu’il pense, réussit une composition pour commedia dell’arte assez jouissive. Quant à Alexandra Lamy, sa blondeur et son abattage, confirme sous le soleil basque sa capacité à tenir un film à bouts de bras.
CHAMBOULTOUT