SOUL BROTHER
PAR ROMAIN GROSMAN
Incarnation d’une soul moderne, Raphael Saadiq sort d’un long silence et de huit ans d’absence avec un album touchant, inspirée par la tragique disparition de son frère Jimmy Lee, des suites d’une overdose.
Raphael Saadiq, le jeune prodige de Tony ! Toni ! Toné !, le dandy de Lucy Pearl (avec Ali Shaheed Muhammad de A Tribe Called Quest et Dawn Robinson de En Vogue), qui réinventait la soul sixties dans Instant Vintage, la stylisait sur Ray Ray, avec le savoir-faire d’un des rares talents de sa génération à la fois auteur-compositeur-interprète et producteur (Q Tip, Macy Gray, Erykah Badu, Joss Stone, Mary J Blige, John Legend, Solange), jamais décevant, revient avec un album personnel, marqué par le combat perdu de son frère contre l’addiction. La cinquantaine entamée, le soulman chez qui le clinquant faisait, à tort, oublier l’écriture, la griffe sonore, signe son enregistrement le plus intime, replongeant dans les méandres d’un passé douloureux, affronté sans concession, avec le renfort de chœurs gospel, de guitares coupantes, portée par une voix plus grave et écorchée que par le passé. De la soul mélancolique, profonde, où les featurings (Kendrick Lamar…) ne distraient pas d’une ligne en clair-obscur, hantée par le temps qui passe et les marques qu’il nous inflige, tôt ou tard. Comme sur le superbe « Something Keeps Calling », très Isley Brothers. Un grand album.
RAPHAEL SAADIQ
Jimmy Lee
(Columbia/Sony)
SOUL R’N’B