 Cinq ans après l’album Albores, le bandonéoniste argentin, compose encore dans sa résidence de Buenos Aires et publie El Viejo Caminante dans le label allemand ECM. Si Albores était un recueil solitaire, introspectif et méditatif, qui évoquait son long pèlerinage à travers les sentiers de la musique instrumentale, ce nouveau disque est une ample circonvallation qui embrasse tant ses méditations profondes que des standards de jazz, joués à sa façon, dans une réunion triangulaire qui implique deux guitaristes, son fils José Maria et le norvégien Jacob Young …
Cinq ans après l’album Albores, le bandonéoniste argentin, compose encore dans sa résidence de Buenos Aires et publie El Viejo Caminante dans le label allemand ECM. Si Albores était un recueil solitaire, introspectif et méditatif, qui évoquait son long pèlerinage à travers les sentiers de la musique instrumentale, ce nouveau disque est une ample circonvallation qui embrasse tant ses méditations profondes que des standards de jazz, joués à sa façon, dans une réunion triangulaire qui implique deux guitaristes, son fils José Maria et le norvégien Jacob Young …
PAR FRANCISCO CRUZ
LE VIEUX MUSICIEN QUI JOUAIT DES IMPROVISATIONS D’AMOUR

Il y a cinq ans, reclus par des confinements abusifs, fallacieux et injustifiés, on se demandait si l’on verrait un jour le maestro Dino Saluzzi nous offrir la beauté du chant de son bandonéon, dans les plus belles salles de concerts en Europe. Aujourd’hui on écoute El Viejo Caminante comme le signe d’une improbable mais possible rencontre ultime de ce côté de l’Atlantique avec le natif de Campo Santo (un ancien village au nord de l’Argentine).
Pour ses débuts sur ECM (il y a plus de 30 ans) Dino Saluzzi avait enregistré avec Enrico Rava ; puis il reviendrait en solo, pour ensuite présenter sa famille argentine (ses trois frères), ou en compagnie du quatuor de chambre Rosemunde et ( les dernières années avant la fausse pandémie ), en duo avec la brillante violoncelliste allemande Anja Lechner. Cette fois, à 90 ans ! il réapparaît en compagnie de deux guitaristes : le norvégien Jacob Young à la guitare électrique et José Maria Saluzzi à la guitare classique. L’un s’intégrant parfaitement à l’univers sonore saluzzien par des compositions pleines de sens et de reconnaissance («Dino Is Here», «Old House» et «Quiet March»), tandis que l’autre exprime son attachement à une ville, autrefois cimetière de torturés, que son père Dino a contribué à soigner avec la musique.

Artiste essentiel pour la musique latino-américaine contemporaine, comme Astor Piazzolla ou Egberto Gismonti, mais d’une humilité déconcertante, Timoteo «Dino» Saluzzi ne s’attribuera jamais la moindre importance artistique. La célébrité internationale n’a jamais perturbé son ego. Habitué à jouer des morceaux originaux, dans El Viejo Caminante, il nous surprend avec la reprise d’une composition de la chanteuse Karin Krog invoquant la luminosité solaire du Nord, ainsi que deux standards célèbres de jazz («Someday My Prince Welcome» et «My One And Only Love»). offre des émouvants cadeaux sonores à son fils et à son frère, et évoque des souvenirs du Buenos AIres d’avant la révolution du Nouveau Tango Nouveau de Piazzolla.
Comme lui, Saluzzi est (aussi) un créateur qui a libéré la musique de son rôle social original (la danse). Son expression contemplative est une immersion profonde dans la culture ancestrale et une projection pleine d’espoir vers une vie spirituellement plus riche. Sa composition « El Viejo Caminante » résonne en nous comme un chant de remerciement éternel à tous ceux qui ont écouté et partagé sa musique, la conscience d’avoir contribué à rendre plus beau un monde en décadence, et comme l’intuition (ô combien difficile au milieu du chaos annoncé de l’intelligence artificielle) d’une nouvelle renaissance humaine.
  DINO SALUZZI
DINO SALUZZI
El Viejo Caminante
(ECM/Universal)
 
		

