six ans de rÉFLEXION
PAR CHRISTIAN LARRÈDE
Le trompettiste et compositeur met à profit un retour en Israël – après six ans d’exil volontaire aux États-Unis – pour s’offrir un nouveau terrain de jeux, au confluent du jazz, de l’ambient et de la pop psychédélique : un voyage immobile parfaitement raccord avec l’époque.
On est en droit de considérer le menu annoncé (i.e. un processus de création proclamé comme collectif pour Big Vicious, nouveau groupe d’un digne héritier de Miles Davis) avec suspicion, considérant la forte personnalité du natif de Tel Aviv. Il semble néanmoins, qu’à l’occasion d’un quatrième album au bénéfice d’un label emblématique d’une certaine idée du son (et de la musique), le scénario d’une belle équipe (dont deux batteurs, deux guitaristes, et une avalanche d’effets électroniques accompagnant le chant de la trompette) réunie au tour d’un projet commun de neuf partitions originales et deux reprises, prévaut. La philosophie en grand écart de l’entreprise prend tout son sens à l’écoute de la version du « Teardrop » de Massive Attack comme une rêverie brumeuse, ou d’une visite tout en suspension de la Sonate au clair de lune de Beethoven et ses arrangements à tiroirs. Pour le reste, des vibrations électroniques riches de toute la suavité du monde, les interventions d’une guitare spatiale, une techno expérimentale ou un groove funky sans arrière-pensée alimentent un disque irisé et en perpétuel mouvement. Après un album, magnifique et dénudé, en duo avec le pianiste Yonathan Avishai, Avishai Cohen se promène dans les plaines du Far-West (« The Cow And The Calf »), alterne sérénité et concision, et démontre une capacité extrême à la réinvention.
AVISHAI COHEN
Big Vicious
(Ecm)
JAZZ